Le GIEC alerte sur l’urgence climatique à l’aube de la COP26

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Un projet de rapport du GIEC avait fuité il y a quelques semaines, alertant sur l’urgence climatique. Lundi 9 août, une première partie de celui-ci a officiellement été publiée. Les prévisions inquiétantes sur l’accélération du réchauffement climatique et les évènements climatiques extrêmes à venir, font tristement écho à la situation actuelle : les incendies en Grèce et en Turquie, les inondations mortelles en Allemagne et en Belgique ou encore la canicule historique dans le Nord-Ouest de l’Amérique. 

Les réactions à ce rapport sont internationales et nombreuses : à quelques mois de la COP26 les positionnements des différents États vis-à-vis du réchauffement climatique dessinent les prémices de la conférence.

On décrypte pour vous le rapport, les réponses internationales, et les enjeux de la COP26 !

Le rapport du GIEC 

Il s’agit de la première partie du 6ème rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat).

Le Giec travaille en trois groupes :  

  • Aspects scientifiques dus système climatique et évolution du climat
  • Conséquences du changement climatique et possibilités de s’y adapter
  • Solutions envisageables pour limiter le réchauffement climatique 

Ce rapport est celui du premier groupe et il faudra attendre 2022 pour avoir les deux autres. Il s’intéresse donc seulement à l’évolution climatique.

Ce que dit le rapport

Le rôle indéniable de l’humanité sur le réchauffement climatique

C’est une des grandes nouveautés du rapport : l’affirmation certaine que les activités humaines sont responsables du réchauffement climatique. Par le passé, les rapports du GIEC jugeaient la responsabilité humaine “très probable” en 2007, puis “extrêmement probable en 2013”. Aujourd’hui, grâce au progrès des connaissances, c’est sans demi-mesure qu’elle est affirmée “indiscutable”.

Le GIEC affirme la responsabilité humaine dans le dérèglements climatique
Centrale électrique – Les activités humaines dérèglent le climat
Image libre de droit

Les combustions d’énergie fossiles (charbon, pétrole et gaz), utilisées pour l’électricité, le transport, l’agriculture et l’industrie ont mené à une hausse de 47% des émissions CO2 depuis l’ère pré industrielle. La réduction des émissions CO2 est au centre de la transition écologique. Mais les émissions de méthane, bien que moins importantes, sont de plus en plus élevées et inquiètent aussi les scientifiques. Le méthane possède un pouvoir de réchauffement 28 fois supérieur à celui du CO2 et représente déjà un quart du réchauffement climatique ! 

Une évolution climatique inquiétante selon le GIEC

Le dérèglement climatique s’intensifie et les températures augmentent plus vite que prévu.

L’ objectif fixé par les accords de Paris était de limiter la hausse des températures à 1,5°C en 2100 par rapport à la période 1850-1900 . Les prévisions du GIEC prévoient qu’au rythme actuel des émissions, ces températures seront atteintes entre 2030 et 2040, soit plus tôt que qu’estimé par leurs prévisions de 2018.

Le GIEC étudie 5 scénarios : du “très peu émetteur” au “très émetteur”. Dans le scénario “très peu émetteur” l’élévation de la température mondiale ne serait que de 1,4°C sur la période 2081-2100. Pour le scénario “peu émetteur” de 1,8°C ; dans “l’intermédiaire” de 2,7°C ; pour “l’émetteur” de 3,6°C ; et pour le “très émetteur” de 4,4°C . Il paraît donc difficilement imaginable de tenir l’objectif des 1,5°C en 2100. Cependant ces scénarios montrent aussi que l’évolution climatique peut être très différente selon la façon dont nos émissions évoluent : entreprendre des changements aujourd’hui peut radicalement changer l’avenir des générations futures.

Différents scénarios de réchauffement climatique réalisés par le GIEC
Évolution de la température à la surface du globe par rapport à la période 1850-1900 selon plusieurs scénarios de réchauffement (en °C)
Source : Le Monde d’après les données du GIEC

Le rapport souligne aussi que la hausse des températures varie selon les zones du globe : les terres émergées sont plus impactées que les océans, et les pôles sont les plus exposés.

Ainsi, dans la situation où la hausse mondiale de la température serait de 2°C, elle serait de plus de 6°C en Antarctique ! Le Nord de l’Amérique et de l’Europe serait aussi au-dessus de la moyenne mondiale, avec une hausse de 3°C à 5°C.

L'antarctique se réchauffe plus vite que le reste de la planète selon le GIEC
Le climat se réchauffe plus rapidement en Antarctique
Image libre de droit

Multiplication des événements climatique extrêmes 

Les canicules et vagues de chaleur vont s’amplifier. Dans le cas où l’on atteindrait un réchauffement mondial de 2°C, la chaleur et les sécheresses dépasseraient plus souvent les seuils de tolérance pour l’agriculture et la santé. Certains de ces changements sont irréversibles : “les glaciers vont continuer de fondre pendant des décennies voire des siècles.” L’élévation du niveau des mers va également se poursuivre pendant cette même échelle de temps. 

Le GIEC aborde aussi la notion de points de basculement, le franchissement d’un seuil de non retour comme la déstabilisation de la calotte glaciaire ou le dépérissement des forêts. Ces points de bascule ont une faible probabilité de réellement être atteints mais auront un fort impact s’ils le sont.

Pour résumer …

Certaines conséquences sont inévitables, et il faut donc s’y adapter, les anticiper afin de mieux s’en protéger. Nos actions actuelles ne déterminent l’ampleur du dérèglement climatique que dans la deuxième moitié du siècle. Il est donc à la fois important de réduire nos émissions pour limiter les effets à long terme du réchauffement climatique, mais aussi de mieux anticiper les évènements climatiques futurs, et de s’organiser pour s’en protéger.

Il faudra attendre 2022 pour avoir le rapport complet du GIEC, avec l’analyse des impacts du dérèglement climatique et les solutions pour atténuer le réchauffement ou s’y adapter.

Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ?

Conclusions du GIEC sur les réponses à l’urgence climatique 

Ce rapport souligne clairement la nécessité de stopper la hausse des températures, et de stabiliser le climat. Pour cela, les experts du GIEC insistent sur l’importance d’atteindre la neutralité carbone, c’est-à-dire la compensation des émissions de carbone par les puits de carbone. La neutralité carbone est un objectif central des accords de Paris pour 2050. Dans le futur nous devrions donc réduire nos émissions, et augmenter la capacité des puits de carbone, afin de réduire la quantité de carbone contenue dans l’atmosphère. 

Une autre possibilité serait de s’intéresser à la réduction des émissions de méthane. Ayant une durée de vie plus courte, mais une capacité de réchauffement plus forte, la baisse de la concentration de méthane dans l’air pourrait avoir un effet positif à plus court terme que le CO2.  

Réactions internationales au rapport du GIEC

Des États se disant prêts à affronter le défi climatique

Rapidement, les réactions internationales se sont fait entendre. Les États-Unis, le Canada, l’Angleterre, l’Allemagne et la France ont notamment affiché la volonté de prendre en compte le rapport et réagir fermement face aux enjeux climatiques.

Le Président français a ainsi déclaré vouloir sceller “un accord à la hauteur de l’urgence” lors de la COP26. Le volontarisme de celui-ci est cependant mis à mal par la récente condamnation du gouvernement par le Conseil d’Etat pour son inaction climatique.

Le rapport du GIEC est sans appel. A nouveau. Le temps de l »indignation est derrière nous.
Accord de Paris, neutralité carbone au niveau européen, loi climat La France restera du côté de ceux qui agissent. En novembre, à  Glasgow, scellons un accord à  la hauteur de l’urgence!— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) August 9, 2021

De l’autre côté de l’Atlantique, l’administration de Joe Biden affirme que le monde “ne peut plus retarder les mesures ambitieuses en matière climatique”. La position de la puissance américaine tranche avec la décision prise par Donald Trump de sortir de l’accord de Paris. Aujourd’hui réintégrés à l’accord, les États-Unis affirment la volonté d’être en première ligne dans la lutte contre le réchauffement climatique.

De nombreux États se déclarent donc prêts à agir, mais doivent maintenant concrétiser leurs ambitions et tenir leurs engagements. 

Des États plus ambigus face aux prévisions du GIEC

En revanche, ces ambitions sont beaucoup moins claires pour d’autres États. Le ministère des affaires étrangères chinois a déclaré que « La communauté internationale doit avoir entièrement confiance dans la mise en œuvre de l’action de la Chine en matière climatique ». Celle-ci s’est engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2060, et un pic de ses rejets CO2 avant 2030. Elle a aussi mis en place un marché carbone en juillet dernier et investit largement dans les énergies renouvelables. Le rapport du GIEC ne semble donc pas changer les plans environnementaux du pays. On peut cependant noter que Pékin a récemment autorisé la réouverture temporaire de mines de charbon. 

Sur le même ton, le premier ministre Australien estime que le pays “fait sa part” et refuse de s’imposer des objectifs climatiques ambitieux. Le pays ne s’est fixé aucune date pour atteindre la neutralité carbone, et préfère plutôt miser sur les nouvelles technologies “pour changer le monde et nos modes de fonctionnement”. 

La Russie n’a elle pas commenté le rapport. Vladimir Poutine s’est contenté d’ordonner au ministère des Situations d’urgence d’augmenter le dispositif chargé de lutter contre les incendies en Sibérie, où ont lieu des feux de forêt historiques. 

La Russie ne réagit pas au rapport du GIEC, malgré des incendies historiques en Sibérie.
Incendies historiques en Sibérie
Source : mlactu.fr

Les régions les plus touchées appellent à une réaction mondiale 

Enfin, différents acteurs internationaux exhortent à une réaction internationale. Sonam P. Wangdi, président des 46 pays les moins développés du monde (LCD), a appelé à plus de soutien pour les pays en développement, disproportionnellement touchés par le changement climatique.  Il a aussi pointé du doigts les grandes puissances économiques en demandant l’assurance que les plus gros émetteurs prennent les devants et réduisent leurs émissions. 

Les États insulaires se sont aussi exprimés après la publication du rapport. L’Aosis (l’Alliance des petits États insulaires) est composée de 39 États membres comme Cuba et les Maldives. Ces États sont plus vulnérables à l’élévation du niveau de la mer, et demandent à tous les gouvernements de prendre des mesures pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C afin de sauver leur avenir. 

La COP26 attendue au tournant

À l’aube de la prochaine conférence sur le climat, le rapport du GIEC sonne donc comme un signal d’alarme : il est nécessaire que le monde s’organise pour répondre aux enjeux climatiques, rapidement et efficacement.

La COP26 se tiendra à Glasgow, en Écosse, du 1er au 12 novembre prochains (donc organisée par le Royaume-Uni). Elle réunit les signataires de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, c’est-à-dire la quasi-totalité des pays (197). 

La dernière conférence de ce genre, en 2019 à Madrid, fut un échec : aucune avancée concrète n’avait été faite, les pays n’arrivant pas à se mettre d’accord. C’est une des raisons pour lesquelles cette nouvelle conférence est attendue au tournant.

La COP26 se tiendra à Glasgow en novembre
La COP26 se déroulera du 1er au 12 novembre 2021 à Glasgow
Source : ukcop26.org

La COP26 a pour but de mettre “toutes les parties d’accord” afin d’accélérer les actions dans le cadre des objectifs fixés par les accords de Paris.

Quatre grands sujets seront évoqués lors de la COP26 . En premier lieu, la sécurisation de la neutralité carbone pour 2050 et la limitation de la hausse des températures à 1,5°C. Puis l’adaptation et la protection des communautés et habitats naturels. La question du financement nécessaire pour soutenir des mesures ambitieuses. Enfin la collaboration des pays, primordiale pour entreprendre des actions cohérentes. 

Plus précisément, il sera question de s’accorder, entre autres, sur : 

  • l’orientation des marchés vers un système mondial de taxe sur le carbone
  • la fin de la dépendance au charbon et la sortie progressive des énergies fossiles
  • la transition vers les véhicules électriques
  • la réduction de la déforestation
  • la protection et restauration des écosystèmes

La COP26 pourrait donc marquer un grand pas dans la lutte contre le réchauffement climatique. 

Que doit-on en retenir ? 

Que le réchauffement climatique évolue plus rapidement que prévu et qu’il faut donc réagir avec des mesures drastiques ! Le rapport du GIEC est clair, les activités humaines sont responsables du réchauffement de la planète. Si nous ne réduisons pas nos émissions, la hausse des températures pourrait atteindre 2°C entre 2030 et 2040. Les événements climatiques extrêmes vont se multiplier, et pourraient mener à des points de non retour. Il nous faut absolument atteindre la neutralité carbone pour contrer ces effets sur le long terme. 

Face à ce constat, les réactions de nombreux États se sont fait entendre, pas toujours sur la même longueur d’ondes… Les pays les plus exposés aux conséquences du réchauffement appellent notamment les gros émetteurs à agir. Ces différentes voix s’entendront très prochainement lors de la COP26 qui ambitionne de concrétiser les objectifs des accords de Paris. Si les pays s’accordent sur des mesures ambitieuses, il s’agira ensuite de les tenir…

Sources 
https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/08/09/la-crise-climatique-s-aggrave-partout-a-des-niveaux-sans-precedent-alerte-le-giec_6090961_3244.html
https://m.20minutes.fr/amp/a/3100035
https://www.msn.com/fr-fr/actualite/other/giec-les-politiques-saluent-le-rapport-mais-nen-tirent-pas-les-m-c3-aames-le-c3-a7ons/ar-AAN6Weu
https://www.rtbf.be/info/societe/detail_rapport-du-giec-2021-des-previsions-plus-pessimistes-un-cri-d-alarme-les-decideurs-sont-ils-prets-reactions?id=10821070
https://www.lalibre.be/planete/environnement/2021/08/11/des-reactions-a-geometrie-variable-BS4FNH7VRVGPTEMVUIYACJNSWY/
https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/08/10/le-terne-bilan-environnemental-de-macron-face-aux-alarmes-du-giec_6091101_823448.html
https://www.7sur7.be/monde/la-chine-assure-que-le-monde-doit-avoir-confiance-en-ses-engagements-climatiques~a3aa8fbb/
https://www.lemonde.fr/climat/article/2020/09/24/la-chine-surprend-en-s-engageant-a-atteindre-la-neutralite-carbone-d-ici-a-2060_6053402_1652612.html
https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/07/16/la-chine-lance-un-systeme-d-echange-de-droits-a-polluer_6088445_3244.html
https://www.rtbf.be/info/monde/detail_changement-climatique-pourquoi-l-australie-reste-t-elle-le-mauvais-eleve-de-la-classe?id=10821649
https://www.ouest-france.fr/environnement/rechauffement-climatique/la-fumee-des-incendies-en-siberie-atteint-le-pole-nord-fde47492-f902-11eb-bfc0-b73bf8d3db27
https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/08/10/le-rapport-du-giec-est-un-code-rouge-pour-l-humanite_6091059_3244.html
https://kuenselonline.com/bhutan-joins-ldcs-calling-for-more-support-following-ipcc-report/
https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/08/10/rapport-du-giec-les-nations-insulaires-appellent-le-monde-a-sauver-leur-avenir_6091064_3244.html
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/12/16/cop25-une-conference-sur-le-climat-a-oublier_6023043_3232.html
https://ukcop26.org/cop26-goals/
https://www.novethic.fr/lexique/detail/cop-26.html

Vincent

Je suis passionné d'écologie et de seconde-main. Je tente depuis 10 ans, de proposer aux gens des alternatives à la sur-consommation en achetant de seconde-main, reconditionné ou à réparer. J'écris sur nouveaux-conso les rubriques sur le calcul du score carbone.